compteur de visite

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

28/01/2019

Jeffrey Eugenides : Des raisons de se plaindre

Jeffrey Eugenides Jeffrey Eugenides, né dans une famille aisée mêlant origines grecques et irlandaises en 1960 à Détroit dans le Michigan, est un romancier américain. Il a obtenu une licence à l'Université Brown en 1983, et un master d'écriture créative à l'université Stanford. Après avoir vécu à Berlin de 1999 à 2004, il s'installe à Princeton dans le New Jersey. Jeffrey Eugenides est l’auteur de trois romans (dont son premier, Virgin Suicide en 1993 doit sa renommée à l’adaptation au cinéma par Sofia Coppola en 1999) et de nombreuses nouvelles. Des raisons de se plaindre, un recueil de dix nouvelles, est son dernier ouvrage, paru à l’automne. 

J’irai droit au but, je n’ai pas grand-chose à dire de ce bouquin, sauf – mais c’est l’essentiel – que toutes ces nouvelles sont excellentes ! Ayant abattu toutes mes cartes, je ne sais plus trop comment développer mon propos.

« La gent masculine, voilà le sujet des nouvelles qui composent Des raisons de se plaindre  » annonce la quatrième de couverture, sauf que manque de pot, le premier texte Les Râleuses, met en scène deux femmes ! C’est l’une des meilleures nouvelles du recueil, Della une octogénaire lentement grignotée par Alzheimer et son amie Cathy, dix ou quinze ans plus jeune, lancées dans une grande évasion…

Difficile, pour moi en tout cas, de trouver un fil rouge reliant tous ces textes. Disons qu’ils permettent à l’écrivain de décrire les rapports humains sous des angles très variés, ce qui fait la force de cet ouvrage. Par exemple, parmi les meilleures nouvelles, Mauvaise poire, où une femme célibataire atteignant la quarantaine veut désespérément un enfant et pour ce faire, cherche à recueillir le sperme de trois hommes triés sur le volet pour confectionner un élixir idéal ! Dans Fondements nouveaux, deux employés d’un vieil éditeur tentent d’arnaquer l’entreprise pour compenser leur maigre salaire, tandis que dans Sujet de plainte, un conférencier en cosmologie se fait sexuellement piéger par une (très) jeune étudiante d’origine Indienne pour empêcher le mariage forcé envisagé par ses parents.

A la réflexion, il y a pourtant un fil rouge. Il est très mince et très rarement au cœur véritable des intrigues mais néanmoins toujours présent : c’est le corps ! Tous ces textes de près ou de loin, font référence au corps, soit qu’il vieillisse et c’est très présent dans Les Râleuses, par contre ce n’est qu’un détail sans intérêt (prise de viagra) dans Fondements nouveaux ; à moins qu’il ne s’agisse de l’os du doigt de Saint-Augustin dans Des Jardins capricieux ou de la diarrhée dans Par avion… etc.

J’en termine, dix textes parfaits, écrits très simplement souvent avec une ironie tendre, chacun nous ouvrant un autre paysage de lecture, comme dix minuscules romans compilés dans un seul livre.

 

« Dans les rues de Chicago, comme dans celles de L.A., de New York, de Houston ou d’Oakland, l’information circulait. Quelques semaines plus tôt, Kendall avait vu le film Patton à la télévision. On y rappelait que le général avait été sévèrement puni pour avoir giflé un soldat. Alors qu’aujourd’hui, Rumsfeld n’était même pas inquiété pour Abou Ghraib. Même le président, qui avait menti pour les armes de destruction massive, avait été réélu. Dans les rues, les gens recevaient le message. Ce qui comptait, c’était la victoire, peu importe s’il fallait utiliser la force ou tenir un double langage pour y parvenir. C’était perceptible dans le comportement des automobilistes, dans la manière dont ils vous coupaient la route, vous faisaient des doigts d’honneur, vous injuriaient. Et les femmes se montraient aussi dures et hargneuses que les hommes. Chacun savait ce qu’il voulait et comment l’obtenir. Personne n’était naïf. Un pays est à l’image de son peuple. Plus nous en apprenions sur le nôtre, plus nous avions honte. » [Fondements nouveaux]

 

 

Jeffrey Eugenides Jeffrey Eugenides   Des raisons de se plaindre   Editions de l’Olivier – 297 pages –

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Olivier Deparis