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17/11/2012

Les bouquinistes à Paris

Dans son merveilleux livre de 1932, Le piéton de Paris, Léon-Paul Fargue qui déambule dans la capitale consacre un chapitre aux quais de la Seine. Entre autres attraits, il constate que les lieux sont occupés par deux sortes de population, les clochards et défavorisés pratiquant de petits métiers comme tondeurs de chiens et glaneurs de charbon qu’on trouve sur les berges au ras du fleuve, tandis qu’au-dessus il y a les bouquinistes.

« Je tiens les bouquinistes pour les êtres les plus délicieux que l’on puisse rencontrer, et, sans doute, participent-ils avec élégance et discrétion à ce renom d’intelligence dont se peut glorifier Paris. Le pays du livre d’occasion a ses frontières aussi. Il va du quai d’Orsay au Jardin des Plantes, sur la rive gauche, et de la Samar comme on dit, au Châtelet, sur la rive droite. » 

Les bouquinistes ont pignon sur fleuve depuis 1607 c'est-à-dire l’époque où fut construit le Pont Neuf. D’abord colporteurs ils commencent à s’y installer avec leurs boîtes de rangement. Ces fameuses boîtes vertes en bois qui restent à demeure sur les parapets quand la « boutique » est fermée. N’est pas bouquiniste qui veut et la profession est très strictement encadrée et réglementée. Les boîtes sont limitées à quatre par vendeur et trois doivent être obligatoirement consacrées à la vente de livres, la dernière pouvant proposer gravures, cartes postales et bibelots pour touristes. Leurs dimensions sont de deux mètres de long et soixante quinze centimètres de profondeur, le vert étant leur couleur obligatoire.

Le règlement impose la présence du bouquiniste au moins quatre jours par semaine quelques soient les conditions météo. Les bouquinistes sont aujourd’hui près de 217 d’après un chiffre d’octobre dernier, répartis sur les trois kilomètres de quais qui vont du pont Marie au quai du Louvre pour la rive droite et du quai de la Tournelle au quai Voltaire pour la rive gauche. Ils sont déclarés patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1992. Le mot « bouquiniste » vient du flamand « boeckjîn » qui signifie « petit livre ».  

N’allez pas croire que le métier de bouquiniste soit un boulot de glandeur, outre le fait qu’il s’agit d’un métier de plein air avec ses aléas, qu’ils doivent se débrouiller pour les vicissitudes liées aux contraintes physiologiques, leur métier les accapare à plein temps. « Et le plus surprenant est qu’aucun d’eux n’ait d’autre métier. Où trouveraient-ils, d’ailleurs, le temps d’être chauffeurs ou détectives privés ? Un bouquiniste tenu de connaître son Histoire, ses textes, ses dates, ses éditeurs, aussi bien sinon mieux qu’un libraire, n’a pas trop de toute sa journée pour bien faire ce qu’il fait. » Néanmoins un métier qui attire, puisque la mairie de Paris dénombre près de deux cents candidats sur ses listes d’attente pour le cas où une boîte se libère et que de nombreuses villes étrangères comme Ottawa, Pékin etc. nous ont copié ce concept.  

 

 

Source photo : Le Bouquineur

 

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