19/06/2013
Agnès Desarthe : Comment j’ai appris à lire
Agnès Desarthe, née en 1966 à Paris, est un écrivain français auteur de livres pour adultes et pour enfants mais aussi traductrice. Fille du pédiatre Aldo Naouri, elle a épousé le cinéaste Dante Desarthe, fils du comédien Gérard Desarthe. Son frère Laurent Naouri, chanteur d'opéra, est l'époux de Natalie Dessay. Agrégée d'anglais, elle a d'abord travaillé comme traductrice avant de publier, en 1992, un premier roman pour adolescents. Son dernier ouvrage, Comment j’ai appris à lire, est paru il y a quelques semaines.
Une idée très répandue voudrait que les écrivains soient des lecteurs forcenés, tombés dès leur plus jeune âge dans une bibliothèque et n’en être jamais ressortis. Agnès Desarthe en est le contre-exemple parfait et en a fait le sujet d’étude de cet essai.
Toute petite elle adorait déjà écrire mais détestait lire. « Lire ne sert à rien. Moi, ce que je veux, c’est écrire », un avis péremptoire et d’autant plus inexplicable que dans son milieu familial, on lisait et parlait plusieurs langues, donc un contexte où la culture n’était pas exclue. Elle réussira néanmoins sa scolarité tout en trouvant le moyen de faire l’impasse sur les classiques de la littérature et ce n’est qu’en hypokhâgne, qu’enfin ( !) l’envie de lire lui viendra, « La révolution a eu lieu. Je vais apprendre à lire. » Car lire n’est pas une activité aussi simple qu’il y paraît. L’activité cache et sous-entend un monde complexe d’interactions mêlant savoir, souvenirs, découvertes, intuition et j’en passe. C’est d’ailleurs, le thème central de ce bouquin, mené comme une enquête intime. Que signifie lire ? Comment apprend-on à lire ? Voilà ce que l’auteure veut nous expliquer tout au long de cet essai passionnant qui se lit comme un roman.
Mais cet essai aborde un autre sujet, concomitant à la lecture pour l’écrivaine, la traduction. Et là, je me suis franchement régalé car il s’agit d’un sujet qui m’a toujours fasciné. Agnès Desarthe, traductrice elle-même, connaît bien son affaire et ses remarques et propos feront le délice des amateurs. « La migration des âmes, la réincarnation. Quelque chose de cet ordre est à l’œuvre dans la traduction » écrit-elle joliment.
Si un bon roman ou le plaisir de lire peut s’épargner la logique, Agnès Desarthe n’en manque pas pour conclure son opus, puisque pour elle, « l’écriture est avant tout un travail de traduction » de la pensée et qu’ « écrire, traduire (…) m’ont appris à lire. » CQFD, la boucle est bouclée. Tous les amateurs de lectures se rueront sur ce livre, quant aux autres, il s’agit certainement du bouquin qu’il vous faut pour mettre le pied à l’étrier.
« J’ai conçu à partir de là une véritable théorie de la traduction. Je ne soupçonnais pas alors que je deviendrais moi-même, un jour, traductrice (et encore moins que j’adopterais dans ma pratique la théorie diamétralement opposée). Mon idée était que le texte d’arrivée devait laisser affleurer les structures et le génie de la langue d’origine, qu’ainsi on offrait au lecteur la possibilité de goûter deux langues pour le prix d’une. »
Agnès Desarthe Comment j’ai appris à lire Stock
Interview d’Agnès Desarthe sur France Inter le 11/02/2013
08:36 Publié dans ESSAIS, Les traductions | Tags : agnès desarthe | Lien permanent | Commentaires (4) | Facebook |
Commentaires
Cela devrait m'intéresser.
Mais quand même, je m'interroge, pourquoi hypokhâgne si on n'accroche pas à la lecture et aux classiques?
J'aime bien le début du billet façon magazine people, cela m' a ouvert des horizons (je savais déjà pour N Dessay, bien sûr)
Écrit par : keisha | 19/06/2013
Le côté people du début de ce billet et qui ne vous a pas échappé, n’est pas gratuit. En fait je voulais souligner une évidence peut-être, mais le plus souvent les gens connus sont liés entre eux par de multiples liens ce qui crée un réseau d’amitiés et d’influences. Quand le talent est là, pas de problème, mais parfois cela explique des notoriétés dont on peine à voir l’origine…
Écrit par : Le Bouquineur | 19/06/2013
Ce n'était bien sûr pas un reproche de ma part. Pas trop d'exogamie même chez les gens connus, et ma foi c'est compréhensible, si on a des atomes crochus et des goûts communs.
Il me semble que pour les noms que vous citez là , le talent est présent!
Écrit par : keisha | 19/06/2013
Pas de problème, j’avais bien pris votre remarque ! Je trouve normal que ceux qui se ressemblent, s’assemblent, et je n’y vois rien de mal en théorie, par ailleurs la vie privée de ces gens ne nous regarde pas …. Sauf quand elle peut éclairer le public lambda, sur des réussites qui s’expliquent mal. Mais dans le cas présent, leur talent avéré est un passeport suffisant.
Écrit par : Le Bouquineur | 19/06/2013
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