13/10/2025
Hanif Kureishi : Black Album
Hanif Kureishi, né en 1954 à Bromley, est un écrivain, scénariste et dramaturge britannique. Il est un des représentants les plus célèbres de la nouvelle école d’écrivains britanniques d’origine étrangère. Ses livres traitent entre autres d'immigration, de racisme et de sexualité. Victime d’une attaque cérébrale en 2022 qui le laisse paralysé, il vit aujourd’hui à Londres où il continue d’écrire. Roman paru en 1995, Black Album vient d’être réédité en poche.
Londres en 1989. Shahid, un jeune étudiant britannique issu d’une famille pakistanaise aisée arrive à Londres pour poursuivre ses études. Passionné de rock et de littérature, il envisage d’être écrivain. Bien vite il va se retrouver coincé entre deux modes de vie, deux mondes qui cohabitent dans ce Londres multiculturel : une société britannique libérale, en la personne de Deedee Osgood, sa professeur de faculté, et Riaz, son voisin de chambre, leader d’un groupe de jeunes musulmans intégristes qu’il fréquente…
Shahid s’amourache de Deedee, une prof bohème (« Quand je peux, je passe beaucoup de temps à ne rien faire. Et j’essaie aussi le plaisir. ») et mariée mais qui vit sa vie très librement et n’hésite pas à prendre le jeunot comme amant, l’initiant aux plaisirs du sexe, des boites de nuit à la mode, à la scène underground et aux drogues.
Le jeune homme, très influençable par ailleurs, va se lier d’amitié un peu à l’insu de son plein gré et par atavisme ethnique avec quelques jeunes sous la férule de Riaz, son voisin de chambre, très impliqué dans la vie de la communauté immigrée. Petit à petit Shahid va se soumettre à leurs désirs, participer à un groupe de défense d’une famille harcelée physiquement par des jeunes d’extrême-droite, taper à la machine à écrire un livre écrit par Riaz etc. Jusqu’à ce que sa double-vie, la débauche avec Deedee et le respect de la religion selon les principes du Coran respectés par ses amis, ne lui crée un conflit moral et concret qui va culminer lors de la fatwa promulguée contre le livre de Salman Rushdie, Les Versets sataniques…
Pour élargir le décor, il y aura un attentat à la bombe dans la gare de Victoria, Chili, le frère de Shahid, macho claqueur de fric et m’as-tu-vu va se retrouver mal embarqué quand des dealers pas sympas vont le harceler méchamment pour récupérer leur fric, une hilarante séquence avec une aubergine marquée d’un message divin…
Conflit culturel et identité avec la contradiction liée à l’assimilation à la société britannique et la fidélité aux origines pakistanaises avec son corollaire, les jeunes musulmans radicaux et les mécanismes de l’embrigadement. Et ce pauvre Shahid qui se démène pour échapper au carcan familial et religieux pour trouver une voie personnelle.
Un très bon roman servi par une écriture très douce, souriante souvent (« On ne pouvait pas trouver dans tout Londres de meilleurs pois chiches même si, ensuite, il faudrait peut-être ouvrir les fenêtres »), où le sexe n’est pas tabou, au son des meilleurs airs rocks de l’époque.
« Dans la foi, ce n’était pas le vrai ou le faux qui comptait, pas plus que le tangible, mais le fait d’appartenir. Il avait remarqué en circulant dans le quartier que les races étaient divisées. Les jeunes Noirs restaient entre eux, les Pakistanais allaient les uns chez les autres, les Bengalis se connaissaient depuis très longtemps de même que les Blancs. Il n’y avait peut-être pas d’hostilité entre les groupes mais elle existait, même si elle restait implicite : ils ne se mélangeaient pas. »
Hanif Kureishi Black Album Christian Bourgois Editeur - 414 pages -
Traduit de l’anglais par Géraldine Koff d’Amico
06:02 Publié dans Etrangers, ROMANS | Tags : hanif kureishi | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
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