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08/02/2024

Rachilde : La Tour d’Amour

rachilde Marguerite Eymery (1860-1953), dite Rachilde, est une femme de lettres française. Fille de militaire, rejetée par son père qui aurait voulu un garçon, et d’une mère excentrique adepte de spiritisme, elle refusa durant son adolescence un premier fiancé militaire proposé par son père, en mettant en balance une menace de suicide, et adopta le pseudonyme de Rachilde lors d’une séance de table tournante. Romancière prolifique, elle écrivit plus de soixante-cinq ouvrages et publia sous les pseudonymes de Jean de Childra et Jean de Chibra. La Tour d’Amour, un roman de 1899 qui créa le scandale lors de sa parution, vient d’être réédité.

Jean Malheux, jeune homme plein de vie, est nommé gardien de phare pour seconder Mathurin Barnabas, vieil homme se semblant plus avoir toute sa tête. Un huis-clos oppressant sur l’Ar-Men, tour dressée au large de l’île de Sein, face à la mer déchainée.

A peine débarqué sur l’îlot Jean comprend que son compagnon n’est pas un gai luron. Seul sur ce minuscule bout de terre, il a perdu toute humanité, il ne parle presque plus mais grogne comme une bête, il ne sait plus lire ni écrire, ne change pas de vêtement et dort avec ses bottes ! Il marche les bras ballants au sol mais remplit sa mission consistant à allumer les feux du phare imperturbablement. Puis viendront des détails plus insolites, parfois il chante avec une voix de femme qui résonne dans la tour et puis, ce chauve à une étrange casquette crasseuse de laquelle pendent des mèches de cheveux féminins…

Allons directement au cœur du sujet : Un jour un navire va couler pris dans la tempête qui fait rage, aucuns rescapés et les cadavres vont défiler devant le phare sous les yeux effrayés du jeunot qui n’a encore rien vu car ce sera le premier pas vers sa découverte du cauchemar avec la dépravation de Mathurin Barnabas ! Je n’en dis pas plus pour ne pas gâcher votre lecture, même si la piste est désormais à peu près claire…

Tout le texte baigne dans une ambiance sexuelle, rien n’est jamais graveleux car tout est dans les allusions et les métaphores, et je vous épargne l’explication psychanalytique du récit, disons que la mer représente la femme (« La mer délirante bavait, crachait, se roulait devant le phare, en se montrant toute nue jusqu’aux entrailles (…) écartant ses cuisses vertes »), pour le phare raide dressé face à elle, vous avez compris, et que les noyées ne sont pas mortes pour tout le monde (!)  

Quand ce terrible roman s’achève, le vieux est mort et l’on comprend que nous venons de lire le livre de bord tenu par Jean Maleux qui désormais lui succède, un futur Barnabas ???

J’ai beaucoup aimé.

 

 

« A cette heure du soir, ça devenait effrayant de voir deux pauvres bonshommes devant ce géant de pierre, sur ce roc abandonné de Dieu. Des lames furieuses le saisissaient en travers et le coupaient à moitié de sa croupe, bavant toute leur écume qui retombait en neige sur les dalles du coin nord. On entendait gronder le canon de la vague donnant ses assauts, ébranlant tout l’édifice et le faisant vibrer comme une trompe de cuivre. Je comprenais maintenant pourquoi on attachait les chaises dans la salle à manger ! L’aspiration de l’eau était, en cas de tempête, tellement violente que cela vous attirait dehors tous les objets libres. Les chrétiens aussi, sans doute… »

 

rachilde Rachilde   La Tour d’Amour   Gallimard L’Imaginaire  - 186 pages -  

 

 

 

 

 

 

rachilde