10/11/2025
Philippe Djian : Dolores
Philippe Djian est un romancier, nouvelliste, parolier et scénariste français né en 1949 à Paris. Longtemps présenté comme un héritier de la Beat Generation en France, il est notamment l'auteur en 1985 de 37°2 le matin qui lui apporta la popularité. Une trentaine de son romans à son actif, dont plusieurs ont été adaptés au cinéma. Dolores, son nouvel opus vient de paraître.
Tout débute par un accident, une petite décapotable italienne conduite par une jeune femme éméchée tente d’éviter un vieux break qui sort de chez lui, mais termine sa route dans le fossé. C’est ainsi que Dolores fait connaissance avec Greg, l’autre conducteur, venu à son aide. Une femme, un homme, à l’opposé l’un de l’autre et pourtant…
Greg est le fils d’un agriculteur endetté qui s’est suicidé, les laissant lui et sa mère Meg dans la panade. Le jeune homme, estropié et claudiquant, bosse dans une supérette tenu par le père d’un de ses copains, Meg picole un peu pour endormir son chagrin. Dolores, elle, est issue d’une famille aisée, vaguement séparée de Marc-André (« Une sorte d’Alain Delon à ses débuts ») qui continue de la harceler, un beau parti qui en ferait le mari idéal selon Rose, sa mère.
Dolores va immédiatement s’attacher à Greg qui lui reste sur la réserve. Dolores est en proie à des questions existentielles, sa vie ne la satisfait pas, Marc-André a des atouts mais ça ne suffit pas (« Ce con est d’une beauté désarmante ») et sa mère qui pousse à la roue l’agace un peu beaucoup. Par ailleurs, le fait que Greg ne lui saute pas dessus comme elle serait en droit de s’y attendre, la désarçonne tout en trouvant cela agréable de n’être pas juste un coup potentiel.
Greg ne veut pas s’engager, il doit vaincre ses complexes liés à sa jambe blessée et ses traumatismes familiaux, le suicide de son père qui lui pèse, sa mère qui se laisse aller, l’argent qui manque et son petit boulot qu’il estime minable, et lui a bien conscience que la différence de classe sociale avec Dolores sera un problème tôt ou tard, d’ailleurs Rose l’en a bien averti plus ou moins directement. Amis oui, amants non, même si cela le turlupine quand même.
Greg et Dolores vont se chercher, se repousser, se retrouver, souffrir chacun dans leur coin, leur relation marquée par des attractions et des rejets successifs reflétant la complexité des liens humains. Dans un monde en plein chaos, grèves, émeutes pour le macrocosme, leur couple souligne les tensions et les inégalités sociales, pour le microcosme.
On retrouve l’écriture de l’écrivain, aérée, souple et sans temps morts, dans un texte non chapitré mais fait de nombreux paragraphes, traitant de son sujet favori et unique, les rapports toujours complexes entre les deux sexes.
Un bon roman de Philippe Djian.
« Le plus drôle – et le plus désespérant, le plus sinistre, sans doute – provenait de l’attitude de Greg à son égard. Il ne cherchait pas à l’éviter, loin s’en fallait. Il ne se refermait pas à la manière d’une huître cafardeuse lorsqu’elle s’approchait, il lui souriait comme si tout allait bien. Elle rongea son frein avec constance durant les jours qui suivirent, perdant peu à peu l’espoir d’un tête-à-tête que Greg n’appelait pas de ses vœux, visiblement, alors qu’elle se languissait dans son coin comme une débile. »
Philippe Djian Dolores Julliard - 217 pages -
06:00 Publié dans Français, ROMANS | Tags : philippe djian | Lien permanent | Commentaires (0) |
Facebook |

