Thomas Bronnec : Coliseum

Thomas Bronnec, né à Brest en 1976, est journaliste et écrivain. Journaliste à Ouest-France depuis janvier 2017, chargé des contenus premium pour les abonnés numériques, mais avant cela, de 2012 à 2017, il a occupé le poste de chef des informations à France Info TV et il est également passé par L’Express, et L'Expansion. Paru en 2024, Coliseum, vient d’être réédité en poche.

France en 2028. Damien Clairville avait été élu à la présidence de la République en dépit d’un taux de participation particulièrement faible. Face à cette crise démocratique le parti du président accepte de choisir son candidat à la future échéance lors d’une émission de télé-réalité toute nouvelle, baptisée The One, sous la direction d'une productrice aux dents très longues. Quatre candidats, réunis durant trois jours dans une maison sous l’œil des caméras et des micros, à eux de se présenter sous leur meilleur jour et d’avancer leurs programmes en en débattant le soir après le dîner. Deux hommes et deux femmes : Nathan Calendreau (Ex-ministre des Finances, veut en profiter pour tenter un come-back), Noémie Lorentz (« Elle n’a pas juste une belle gueule. Et des beaux seins, aussi »), Yann Privat (« il ressemble à ce gars qui se lance maladroitement sur la piste de danse, parce qu’il faut y aller ») et Muriel Brey (« des airs d’institutrice de la IIIème république »).  

Au même moment, trois hommes sans rapport les uns avec les autres, dont un député, sont assassinés avec un message : à chaque féminicide commis, un homme au hasard sera tué ! « Il faut frapper un homme au hasard, chaque fois, n’importe lequel. Un homme fait de tous les hommes, et qui les vaut tous, et que vaut n’importe qui, comme dirait Sartre », tel est le crédo d’un trio de féministes lancées dans un combat mortel.

Un bouquin vraiment pas mal du tout tant il est proche de nous, tant il ressemble hélas trop à notre paysage politique actuel : « La droite se trumpise, poursuit Calendreau, parce que ses leaders sont cyniques et y voient une façon de revenir au pouvoir. Mais tous les élus, tous les électeurs de droite ne veulent pas de ça. A eux il faut offrir une alternative. »

Comme souvent dans les polars, l’intrigue coure deux lièvres à la fois, la lutte sournoise et se voulant subtile entre les prétendants à l’élection, coups bas, insinuations, tout en cherchant à ne pas heurter les téléspectateurs, et le plan machiavélique des féministes dont les rôles sont basiquement répartis, Thaïs, l’intello théorise politiquement leurs actions, Liên, la tueuse, « elle est le démon », et Pauline qui adhère à la cause mais « ne tuera personne parce qu’elle n’en a pas la force ». Comme de bien entendu, les deux lièvres ne nous poseront pas de lapin et finiront par se rejoindre, disons que Liên cherche une vengeance très ciblée contre Calendreau, lequel a « oublié » un moment de sa vie passée qui pourrait/va lui porter tort. Ce qui nous donne cette belle punchline, « Nathan Calendreau a davantage de miséricorde pour ceux qui enjolivent un peu leur passé que pour ceux qui dessinent un avenir qu’ils savent déjà ne pas tenir. »

Crise démocratique et médiatisation de la politique, société du spectacle et manipulation, violence et vengeance féministe, bref, un thriller politique et une satire sociale pour ce bon bouquin.

« La démocratie, c’est ce que nos ennemis détestent. Les Russes, les Chinois, les populistes, les fondamentalistes, tous ceux-là ont un point commun : leur haine de la démocratie. La démocratie n’est pas « importante’, elle est essentielle, elle est le sang qui coule dans nos veines, l’air que nous respirons. Sans elle, nous n’existons pas. Manier les mots avec dextérité, c’est sans doute trop demander. »

 

 

Thomas Bronnec   Coliseum   Folio  - 280 pages -