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13/06/2019

Joyce Carol Oates : Confessions d’un gang de filles

joyce carol oatesJoyce Carol Oates, née en 1938 à Lockport dans l'Etat de New York, est une femme de lettres américaine, à la fois poétesse, romancière, nouvelliste, dramaturge et essayiste. Elle a également publié plusieurs romans policiers sous les pseudonymes de Rosamond Smith et Lauren Kelly. Son œuvre, conséquente, a fait l’objet de nombreux prix littéraires. Confessions d’un gang de filles  date de 1995.

Une petite ville de l’Etat de New York, près du lac Ontario, au cœur des années 1950. Cinq gamines, sous l’impulsion de Legs créent un gang. Un gang de filles baptisé Foxfire, pour se venger des humiliations diverses subies chaque jour de la part des hommes. Ce pacte puissant, à la vie à la mort, va les entrainer dans une spirale infernale…

Pour ce roman, Joyce Carol Oates adopte la forme du journal, plus précisément Maddy, longtemps après les faits, reprend ses carnets où elle notait pour le gang leurs faits et gestes, pour en tirer un récit. Récit pour mettre noir sur blanc l’enchainement dramatique des évènements et par là, si possible, en comprendre la logique.

Le gang durera trois ans et s’il n’était exclusivement constitué de filles, ressemblerait peu ou prou, à tous ces récits du genre : des enfances difficiles dans des familles bancales d’où le désir de s’en créer une artificielle à savoir le gang, un tatouage pour signifier l’appartenance à ce groupe, les actions d’éclat pour se venger de tel ou tel. Legs connaitra et subira la maison de correction, puis libérée, réunira sa petite bande dans une maison commune. La vie en communauté dans une vieille ferme pourave, avant l’escalade et enfin le coup ultime, trop gros, un kidnapping qui va précipiter les évènements finaux.  Tels sont les faits, pour la forme, dans leurs grandes lignes.

Pour le fond, l’auteure a écrit un roman féministe, « Nous vivions une époque où la violence s’exerçait contre les adolescentes et les femmes mais, alors, nous ne disposions pas du langage qu’il fallait pour en parler ». Legs et sa bande, en veulent aux hommes, une haine farouche contre ces prédateurs sexuels toujours prêts à fondre sur leur proie, quelque soit son âge. Des proies innocentes au début du roman mais qui sauront en tirer parti, plus tard, pour réussir leur kidnapping. Haine féministe mais aussi révolte de la jeunesse contre l’autorité, contre la société. Le vieux rêve révolutionnaire et anticapitaliste, « Il n’y aura plus un lieu pour les riches et un lieu pour les pauvres. Mais je commence à comprendre que c’est pas pour demain. » Ce pressentiment va éloigner Maddy du groupe quand Legs voudra enlever contre rançon, un très riche habitant des environs. L’écrivaine esquisse aussi le thème de la justice pour les mineurs, les facettes de la mémoire, le passage de l’adolescence à l’âge adulte quand nos rêves juvéniles se confrontent à la réalité du monde…  

Personnages ambigus, zones d'ombre, violence et pulsions sexuelles, toutes les caractéristiques des romans de Joyce Carol Oates sont réunies mais je n’ai pas vraiment accroché. Ce qui m’a manqué, c’est la chaleur ou l’empathie. Ici, tout est froid, presque impersonnel et la forme du journal fait ressortir ce « défaut » pour mon goût. Un roman de qualité, c’est indéniable, mais pas assez convaincant pour moi.  

 

« « Pas un mot de ce qui se passe ce soir entre nous cinq au reste du monde. Sous peine de mort, dit Legs. – Oui. Entendu, dit Goldie. – Oui, dit Lana. – Oui. Oh oui ! dit Rita. – Oui » dit Maddy, après une pause, une boule dans la gorge. J’avais treize ans et oh oui ! j’aurais juré n’importe quoi je me serai planté un pic à glace dans la chair pour sceller ce pacte sacré si ma main n’avait pas faibli en ce jour de l’an 1953 – le jour de la naissance de FOXFIRE. »

 

 

joyce carol oatesJoyce Carol Oates   Confessions d’un gang de filles    Stock – 375 pages –

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Michèle Lévy-Bram