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02/12/2014

Craig Davidson: Cataract City

Craig DavidsonCraig Davidson, né en 1976 à Toronto, est un écrivain canadien anglophone. Il vit à Calgary, en Alberta. Son premier recueil de nouvelles, paru en 2006 en français sous le titre Un goût de rouille et d'os, a été adapté au cinéma par le réalisateur français Jacques Audiard en 2012. Son troisième ouvrage, Cataract City, est sorti il y a quelques mois.

Duncan Diggs et Owen Stuckey ont grandi à Niagara Falls, surnommée par ses habitants Cataract City, petite ville ouvrière à la frontière du Canada et des États-Unis. Ils se sont promis de quitter ce lieu sans avenir où l’on n’a d’autre choix que de travailler à l’usine ou de vivoter de trafics et de paris. Tandis que le premier, obligé de renoncer à une brillante carrière de basketteur, s’engage dans la police, le second collectionne les mauvaises fréquentations et sort de huit années de prison quand le roman débute.

Si vous aimez les romans où les personnages semblent vivre sous vos yeux en chair et en os, vous allez être gâtés ! Ah ! Ah ! Ah ! Parce qu’on a l’impression à lire Craig Davidson qu’il s’est déniché un créneau original ( ?) dans lequel il se vautre avec volupté, l’étalage des corps en souffrance, des os fracturés, des plaies sanguinolentes, des gnons et des moignons, des cicatrices sur la peau, j’en passe et des meilleurs.

Le roman est fait de présent et passé en flashbacks parfois désarçonnant, le tout reconstituant la vie d’Owen et Duncan, de l’époque de leurs huit ans, copains de rue, jusqu’à l’âge d’homme. Enfants ils ont été « enlevés » en forêt durant trois jours par leur idole, un catcheur pas vraiment méchant mais bien allumé et usé, ce qui nous vaut les premières scènes de souffrance, ici dans les milieux du catch (on pense au Mickey Rourke du film The Wrestler), puis le parcourt du combattant type commando pour s’échapper de la forêt-marécage, sauf que ce sont des gamins.

C’est un peu une des facilités du scénario, plonger nos deux héros dans des environnements divers mais tous sujets parfaits pour que Craig Davidson expose son obsession : il y aura donc après le catch, les courses de chiens, les combats de boxe minables (là on pense à Ragging Bull de Martin Scorcèse), les thanatopracteurs des Pompes funèbres etc. et j’y ai vu des passages barbants. Même si globalement, le roman est plutôt réussi, on hésite souvent entre bien et mauvais. Par exemple la construction, allie la très banale alternance de chapitres dressant le portrait d’Owen ou de Duncan avec des ellipses ou des retours en arrière qui déstabilisent avec bonheur le lecteur. Ou bien la très longue séquence finale avec Owen et Duncan alors adultes, une course poursuite avec un gros méchant, dans la neige et la glace, en forêt au bord du fleuve - ce qui boucle avec le début du roman et leur enlèvement – elle tient le lecteur en haleine mais les exagérations des blessures et souffrances éprouvées agacent en même temps.

Il y aussi du bon, le personnage puissant d’Edwina qui passera d’Owen à Duncan puis quittera la ville, « Elle est partie sans s’arrêter. Elle a réussi le seul truc que, malgré tous les rêves, tous les projets, je n’avais pu me résoudre à faire : quitter Cataract City. » Quant au fond du roman, l’amitié virile, les destinées, l’amour, il est gentiment traité sans soulever un enthousiasme notable. L’écriture est fluide, le rythme enlevé, ça se lit très bien. Le début et la fin (malgré les outrances déjà dénoncées) du bouquin sont très bien aussi.

J’ai dit précédemment que le roman était globalement réussi, je ne vais pas changer d’opinion maintenant. Mais ne m’en demandez pas plus non plus.  

 

« J’ai reculé en lui jetant une série de gauches et droites bien sèches. D’un direct fulgurant, je lui ai ouvert la peau au-dessus de l’œil gauche. Le sang a coulé autour de l’orbite avant de se répandre sur le bord de la mâchoire. Le gars s’est palpé le visage, étalant son sang sur son cou, et il a frappé. Il m’a atteint à l’épaule – plus une gifle qu’un coup de poing, mais j’étais tout de même ébranlé. Je me suis redressé et, du même élan, je lui ai balancé le mien dans le nez. En se cassant, le cartilage a craqué comme la pointe d’une banane pas mûre. »

 

Craig DavidsonCraig Davidson  Cataract City  Albin Michel – 484 pages –

Traduit de l’anglais (Canada) par Jean-Luc Piningre

 

 

 

 

 

 

 

08:01 Publié dans Etrangers | Tags : craig davidson | Lien permanent | Commentaires (2) |  Facebook |

Commentaires

Le sujet me plait, mais ton billet confirme mon impression que l'auteur en fait peut-être un peu trop...

Écrit par : Sandrine | 02/12/2014

Je n’ai lu que cet ouvrage de Craig Davidson, donc je ne peux pas porter un jugement définitif sur cet écrivain mais concernant ce roman, je trouve qu’effectivement il en fait un peu trop… ce qui ne condamne pas pour autant le bouquin !

Écrit par : Le Bouquineur | 02/12/2014

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