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10/02/2025

Louis Guilloux : Coco perdu

Louis GuilllouxLouis Guilloux (1899-1980) journaliste, natif de Saint-Brieuc, publie son premier roman en 1927 et en 1935 Le Sang noir rate de peu le prix Goncourt (raflé par Joseph Peyré avec Sang et Lumière). Ses convictions humanistes le conduiront à devenir secrétaire du 1er Congrès mondial des écrivains antifascistes et responsable du Secours Populaire. Coco perdu, sous-titré Essai de voix, roman de 1978, vient d’être réédité.

Un week-end dans une ville de province. Samedi, Coco accompagne sa femme Fafa à la gare, elle doit prendre le train pour Paris. En chemin elle tient à poster une lettre et insiste pour le faire elle-même (« C’est ça qui m’a mis la puce à l’oreille »). Célibataire pour quelques jours, Coco erre en ville, un peu emprunté dans ce rôle inattendu. Il suppose que la fameuse lettre est pour lui et il l’attend avec une impatience qu’il tente de contenir. Le dimanche il n’y a pas de courrier bien entendu et le lundi il sait que la poste est débordée le matin mais il espère néanmoins…

Le roman est court mais une fois de plus Louis Guilloux y démontre tout son talent de conteur.

Que sait-on de Coco ? Il est retraité mais « je suis valide, moi, j’ai encore mes bonnes jambes », il a lâché le monde et la manière dont il tourne, pas très bien à ses yeux, « les informations « c’est toujours la même chose, depuis longtemps, le cul du Tsar, la gueule de Staline, et tout le sacré bordel ». Un type très ordinaire, de ceux qu’on croise, silhouettes anonymes, dans les rues et les bistrots, « c’est vrai, faut que j’l’avoue, j’ai pas beaucoup d’instruction ».

Même son nom exact nous échappe, comme pour Fafa, elle, il l’a épousée il y a longtemps, connue à Paris, beaucoup plus jeune que lui. Tout allait bien entre eux et c’est elle qui a insisté pour qu’ils viennent ici, ville natale de Coco, pourtant il pressentait qu’elle s’y ennuierait. Et là, elle part à Paris, il ne sait pas pourquoi exactement, ni pour combien de temps. Coco est dans le déni. Il ne veut pas croire à l’inéluctable, d’ailleurs il n’y pense pas vraiment.

C’est à tout cela que repense Coco durant ces quelques jours. Et de croiser moult personnages très divers, un homme menotté à un gendarme, un VRP au restaurant, un vendeur de billets de loterie ambulant, un évangéliste qui sonne à sa porte etc. Il déjeune au Parisien, le café-restaurant où les serveuses le connaissent, sauf dimanche car c’est fermé et il va dans un restaurant plus huppé, il n’y est pas à son aise, ce n’est pas son milieu social.

Là, l’écrivain met le doigt sur le décor général de son roman, celui des gens simples avec de petites vies aussi modestes qu’eux, le peuple. Et parmi ces gens, Coco, qui se cache ce qu’il sait inconsciemment, essayant de survivre mais incapable de faire la fête comme il se le promettait, désormais seul, effrayé. Mais en même temps, qu’attendait-il d’autre de la vie ?

Quelques notes d’humour viennent adoucir ce roman plein de pudeur et d’amour pour ce brave homme qui désormais le sait, il n’y aura pas de lettre pour lui.

 

« Oh, bien sûr, on avait eu nos petites histoires, comme tout le monde, c’est la vie. Mais c’était fini, ça, depuis longtemps. On y pensait plus jamais. Où c’est qu’elle est à présent, la Fafa ? Faut pas y penser. A quoi ça sert ? Si elle s’emmerdait autant que moi y avait p’t’être pas autre chose à faire que c’qu’elle a fait. »

 

Louis GuilllouxLouis Guilloux   Coco perdu   Folio  - 123 pages -    

Commentaires

Je n'ai même pas lu Le sang noir! Et celui-ci fait très envie aussi. Guilloux est un grand vide dans ma culture littéraire...

Écrit par : Cleanthe | 11/02/2025

Répondre à ce commentaire

Un très bon écrivain qui mérite largement le détour et je ne peux que fortement te le conseiller. Tente de glisser "Le sang noir" dans tes priorités...

Écrit par : Le Bouquineur | 11/02/2025

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