25/09/2025
Margaret Kennedy : Les Oracles
Margaret Kennedy (1896-1967) est une femme de lettres, romancière et scénariste britannique. Les Oracles est un roman paru en 1955.
En Angleterre dans les années 50, une petite ville sur le canal de Bristol, bras de mer séparant le pays de Galles méridional de l'Angleterre du Sud-Ouest. Le lendemain d'un violent orage, l’artiste reconnu et bohème Conrad Swann a disparu, laissant derrière lui une compagne, cinq enfants et sa nouvelle sculpture, l'Apollon. Certains, dont Martha la mécène de Conrad, crient au chef-d’œuvre et tentent de convaincre la municipalité de faire l'acquisition de l'Apollon. Pour d'autres, comme Dickie le notaire, l'œuvre ressemble étrangement à une chaise de jardin déformée par la foudre... Et les tensions de s'exacerber autour de cette « affaire ».
Il m’a fallu pas loin de deux cents pages pour commencer à m’intéresser à ce roman qui s’avèrera sympathique sans plus. De nombreux personnages et plusieurs histoires noient un peu le lecteur (moi) au début du roman, jusqu’à ce que le propos de l’écrivaine commence à prendre forme : une satire sociale et artistique.
La satire artistique est basée sur l’Apollon, en réalité une chaise de jardin métallique déformée par la foudre de l’orage qu’on retrouve dans l’atelier de l’artiste. Martha y voit une œuvre grandiose de son poulain quand d’autres la trouve carrément inquiétante, « un amas de métal à la fois gracile et mesquin, informe et anguleux, mais curieusement menaçant comme prêt à vous bondir dessus à tout moment ». Quand elle veut faire acheter cette « chose » par la municipalité, le comité est partagé, à commencer par Dickie, bien qu’il reconnaisse ne rien y connaitre en art moderne, son bon sens le fait tiquer mais il n’insiste pas trop devant les arguments présentés, « mon neveu dit que l’art n’a plus besoin de viser le beau. C’est parce que les artistes ne peuvent pas continuer à représenter éternellement la même chose et qu’ils ont épuisé le stock de la beauté. » Cet angle du roman est plutôt réussi et amusant.
Le second axe principal du livre, c’est le couple Dickie/Christina. Lui a des qualités et des talents que sa modestie brime dans ses ambitions secrètes. Il aime l’art et la littérature mais s’ennuie dans cette petite bourgade et ça déteint sur son couple qui manque de se séparer.
Et du côté de chez Swann me demanderez-vous ? Que deviennent les gamins ? Où est passé l’artiste et pourquoi ne donne-t-il plus signe de vie ? Si ça vous intéresse tant, vous le lirez vous-même !
Un roman gentiment grinçant et critique de la société anglaise des années 1950.
« L’opportunité paraissait favorable aux yeux de Martha, car Mrs Hughes faisait également partie de la commission de sélection. Il fallait tout d’abord mettre à bas l’inévitable résistance à l’étrangeté. Ces acquéreurs putatifs auraient certainement une réaction de rejet à la vue de l’Apollon – elle en était certaine, quoiqu’elle ne l’ait pas vu. Dans des termes très simples que l’intellect le plus limité pouvait comprendre, elle leur expliqua que nombre d’œuvres considérées aujourd’hui comme magistrales avaient été, à leur époque, jugées hideuses, ridicules. Rares étaient ceux qui pouvaient apprécier d’emblée une œuvre originale, moderne. Les masses les recevaient toujours avec des hurlements de protestation. »
Margaret Kennedy Les Oracles Folio - 475 pages -
Traduit de l’anglais par Anne-Sylvie Homassel
06:00 Publié dans Etrangers, ROMANS | Tags : margaret kennedy | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook |
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