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04/03/2024

Colson Whitehead : L’Intuitionniste

colson whiteheadArch Colson Chipp Whitehead, né en 1969 à New York, est un romancier américain. Il fréquente la Trinity School de New York puis est diplômé de l'université Harvard en 1991. Journaliste, ses travaux paraissent dans de nombreuses publications comme The New York Times ou The Village Voice. Il est un des rares écrivains à remporter deux fois le Prix Pulitzer pour des fictions, en 2017 pour Underground Railroad et en 2020 pour Nickel Boys. L’Intuitionniste, qui vient de reparaître dans une nouvelle traduction, est le premier roman de l’écrivain (1999).

Une ville jamais nommée, certainement New York, à une époque jamais définie, sûrement au cours des années 1930. Lila Mae Watson, notre héroïne, est « intuitionniste » dans le service municipal d’inspection des ascenseurs de la ville. Son job consiste à vérifier qu’ils sont en bon état mais son talent réside non pas dans un examen minutieux de chacune des pièces de la cabine et du mécanisme, mais de simplement ressentir et recueillir ses impressions, et à ce petit jeu c’est une experte qui ne se trompe jamais. Jusqu’à ce que le lendemain d’une de ses inspections, un ascenseur s’écrase peu de temps avant que le maire n’y monte…

L’accident s’est passé en pleine campagne électorale et au sein de la Guilde des inspecteurs des ascenseurs municipaux, deux écoles s’affrontent, celle des « intuitionnistes » et celle des partisans de l’empirisme, pour une lutte de pouvoir. Lila Mae devient une suspecte idéale et ne voit qu’une solution, trouver elle-même qui a fait le coup !

Quel étrange roman.

J’ai d’abord pensé que l’intrigue se déroulait dans un contexte réel mais qui m’était complètement inconnu : longues descriptions des types d’ascenseurs, de leur fonctionnement etc. tirés de livres et manuels semblant très sérieux et cette profession, assez abracadabrante d’intuitionniste dont « le principe est de communiquer avec l’ascenseur sur un plan immatériel » ! Le mystère de cette extravagante fiction évacué il reste une intrigue gentiment complexe à suivre car s’y mêlent de nombreuses luttes diverses, la campagne municipale du maire, celle de l’élection d’un nouveau président de la Guilde des inspecteurs et un parrain de la maffia qui palpe en sous-main sur les réparations des ascenseurs ; tout ce petit monde courant désespérément à la recherche d’une boite noire conçue jadis par un nommé Fulton, recelant le secret de fabrication d’un ascenseur parfait. Pièges, usurpation d’identité, Lila Mae va devoir s’activer les méninges et ne faire confiance à personne pour démêler ce sac d’embrouilles.

Derrière l’intrigue genre thriller, Colson Whitehead traite du problème racial : Lila Mae est Noire et comme telle, première femme à exercer son métier si spécialisé.  

Pour un premier roman, c’est réellement bluffant. Outre l’idée de base complètement scotchant qui nous fait croire à la réalité de cette fiction, le texte est extrêmement pointu que ce soit dans le domaine technique (ascenseurs) ou ces petits détails sur les scènes de vie de l’époque. Et si vous pensez que ce n’est pas très intéressant (moi-même, au début, ces machins d’ascenseurs… hum ! hum !) vous êtes entrainés malgré vous par le style de l’écrivain, un peu déjanté mais pas vraiment, avec des digressions mais pas vraiment et plein de jolies choses comme ces scènes de tous les jours.

 

 

« C’est un type sans scrupules. Un tyran. Et je me fous pas mal des intuitionnistes aussi et de leurs tours de passe-passe. Moi, ce qui m’intéresse, c’est de savoir ce qui s’est passé au Fanny Briggs vendredi dernier à environ 15h35. Je me fous de savoir si c’était au roi du Siam que le maire faisait visiter l’immeuble. Tout ce qui m’intéresse, c’est ce qui est arrivé à cet ascenseur. Quelqu’un l’a trafiqué. Point. Et la dernière personne à avoir été faire un tour là-haut, c’est Lila Mae Watson. Elle sait forcément quelque chose. Sûrement plus en tout cas que ce qu’elle a mis dans son rapport. »

 

 

colson whiteheadColson Whitehead   L’Intuitionniste   Albin Michel  - 366 pages -    

Traduction révisée de l’américain par Catherine Gibert