24/02/2014
William Shaw : Du sang sur Abbey Road
Le journaliste William Shaw a écrit sur la culture populaire et underground pour The Observer et le New York Times. En tant que contributeur pour le magazine Details, il a infiltré la scène musicale néo-nazie américaine et vécu un mois à la façon des hommes de Cro-Magnon dans le désert de l'Utah. Son tout nouveau roman, Du sang sur Abbey Road, vient de paraître.
« Londres, 1968, quartier d'Abbey Road. Le corps nu d'une jeune femme est retrouvé sous un matelas. En charge de l'enquête, le détective Cathal Breen pense à une des fans des Beatles qui campent près du célèbre studio. Après avoir terni sa réputation par un inexplicable acte de lâcheté, Breen sait que cette affaire est son unique chance de sauver sa carrière. Mais ce vieux garçon, encore sous le choc de la mort de son père, va devoir faire face à une société en pleine mutation qui le dépasse. Et personne n'incarne mieux cette nouvelle réalité que la jeune inspectrice stagiaire, Helen Tozer, chargée de l'assister. »
Le délicieux titre français (A Song From Dead Lips dans la version originale) de ce polar ne pouvait me laisser indifférent et je le trouve parfaitement adapté au bouquin. Un, il annonce un polar classique, deux, il se déroule à Londres, trois, la rue citée évoque tant de choses pour moi que j’étais obligé d’aller y mettre mon nez. Et j’en ressors absolument conquis.
Tout est excellent dans ce roman. L’intrigue, où saphisme et génocide au Biafra sont les moteurs, tient bien la route. Le tandem Cathal « Paddy » Breen et Helen Tozer, banal dans l’absolu mais tellement bien en harmonie ici qu’il sera très certainement adapté au cinéma ou dans une série télévisée (on parie ?). Les autres personnages, gravitant autour des flics ou secondaires, sont parfaitement décris et même les silhouettes des Beatles évoluant dans le fond du décor sont crédibles.
William Shaw écrit fort bien, son boulot de journaliste certainement, lui donnant une aisance pour les dialogues très réussis et le rythme de son histoire. Autour de l’intrigue proprement dite, l’écrivain sait aussi greffer des scènes annexes pour étoffer le tout. Et comme un bon polar ne saurait se contenter d’une bonne intrigue, les références sociologiques de l’époque (le racisme populaire, le sexisme, la politique et bien sûr la pop music qui déferle) et les tourments psychologiques de ses deux héros (mort du père pour l’un, de la sœur pour l’autre) très habilement glissés dans le récit, sans lourdeur aucune, s’insèrent magnifiquement dans le tableau. Le ton général de l’ouvrage est léger – sans vraiment parler d’humour, mais il y en a aussi – avec des bulles de tendresse et d’émotion pour en rehausser la saveur.
Je recommande chaudement ce roman à tous et je ne vois aucune raison pour que vous n’embarquiez pas dans ce Magical Mystery Tour … of course ! Autre bonne nouvelle, cerise sur le cake, l’éditeur annonce ce bouquin comme le premier d’une trilogie de romans noirs situés dans ce Londres de 1968.
« - Un bien plus joli cadavre que vos ossements calcinés de la dernière fois, dit-il. Toujours penché, il tendit la main et, le tenant entre le pouce et l’index, inséra le thermomètre dans l’anus de la morte. – Au moins, la position est commode, dit-il en tournant le tube de verre pour l’enfoncer plus profondément. Ca ne lui fera même pas mal, marmonna-t-il. Breen, ravala ce qui lui montait dans la gorge. – Charmant murmura un des flics. »
William Shaw Du sang sur Abbey Road Les Escales noires - 423 pages –
Traduit de l’anglais par Paul Benita
08:06 Publié dans POLARS | Tags : william shaw | Lien permanent | Commentaires (3) | Facebook |